Bras armé des infrastructures : le génie travaux congolais affine sa relance

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Partenariat PNUD-Défense congolaise : un cadre de gouvernance renforcé

Reçue au ministère de la Défense nationale le 30 juin, la représentante résidente du Programme des Nations unies pour le développement, Adama Dian-Barry, a présenté l’esquisse de la nouvelle stratégie d’opérationnalisation du génie travaux. L’initiative, pilotée par le général de corps d’armée Charles Richard Mondjo, s’inscrit dans une relation de confiance ancienne entre Brazzaville et le PNUD, relation souvent citée comme modèle de coopération civilo-militaire en Afrique centrale. Le document propose un dispositif de gouvernance articulé autour d’une « Unité centrale de gestion du génie » qui sera dotée d’un mandat clair : planifier, conduire et évaluer la contribution du corps du génie aux projets structurants d’intérêt national tout en répondant aux exigences opérationnelles des forces armées.

Recrutement et montée en puissance des effectifs du génie

Le premier axe du plan consiste à redimensionner le personnel. D’ici 2026, quelque neuf cents techniciens, contremaîtres, officiers et sous-officiers supplémentaires rejoindront les rangs. Le schéma de recrutement mise sur un dosage apprécié par plusieurs chancelleries occidentales : un quart de profils issus de l’enseignement supérieur national, un quart de spécialistes formés à l’étranger et la moitié provenant de la filière classique des Forces armées congolaises. Cette hybridation vise à préserver la culture militaire tout en irrigant le corps du génie de compétences actualisées dans les domaines du BTP, de l’hydraulique et de l’énergie photovoltaïque. Selon un conseiller technique du ministère, « c’est la masse critique minimale pour garantir la réactivité sur deux fronts : soutien aux opérations intérieures et contribution à la reconstruction post-crise ».

Capacités matérielles adaptées au relief et au climat équatorial

Pour passer du concept à l’action, le génie travaux sera doté d’une flotte d’engins spécialement sélectionnés pour les sols argileux et les précipitations abondantes, typiques des départements de la Sangha et de la Likouala. Bulldozers amphibies, centrales à béton mobile à faible consommation, ponts préfabriqués modulaires : autant d’équipements déjà identifiés auprès de fabricants sud-africains et asiatiques. Le volet logistique retient l’attention des bailleurs, car chaque chantier militaire doit être autonome en énergie et télécommunications sécurisées. Brazzaville entend également privilégier l’achat de pièces détachées compatibles avec l’existant afin de contenir les coûts de maintenance. Cette rationalisation, saluée par plusieurs attachés de défense, conforte la cohérence d’ensemble de la stratégie.

Formation managériale et transfert de compétences

Au-delà du bricolage tactique, l’armée congolaise souhaite fonder une véritable école de management de projet appliqué au génie. Le PNUD pilotera, avec l’École nationale supérieure polytechnique de Pointe-Noire, des modules certifiants mêlant conduite de chantier, passation de marchés et normes environnementales. Les officiers appelés à rejoindre l’unité centrale suivront en parallèle un cycle de perfectionnement au Centre interarmées d’Oyo, enrichi d’interventions de la coopération française et du service de génie marocain. « Il s’agit de rendre l’outil pérenne par un transfert de savoir-faire plutôt que par une simple fourniture d’équipements », souligne une source diplomatique proche du dossier. La dimension managériale est jugée décisive pour garantir la bonne articulation entre planification militaire et impératifs de développement.

Retombées socio-économiques et diplomatiques d’une ingénierie duale

Si la finalité première reste la mobilité des forces, Brazzaville anticipe des externalités positives pour la population. L’ouverture de pistes, la mise en place de micro-réseaux hydrauliques et l’extension du réseau électrique rural sont autant de services qui renforceront la cohésion nationale et l’attractivité des zones frontalières. Sur le plan diplomatique, le Congo consolide ainsi sa réputation de partenaire de sécurité fiable dans la sous-région ; plusieurs États de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale s’intéressent déjà à des missions conjointes dans le domaine humanitaire. Le génie travaux pourrait devenir l’un des vecteurs privilégiés de la diplomatie de défense prônée par le président Denis Sassou Nguesso, dans la droite ligne du Livre blanc 2022.

Calendrier d’opérationnalisation et mécanismes de suivi

Concrètement, le texte en cours de finalisation trace un horizon à trois ans. La première année couvrira la création des unités, la seconde la montée en puissance opérationnelle et la troisième l’évaluation par des audits indépendants. Un comité interministériel, présidé par le ministre Charles Richard Mondjo, rendra un rapport semestriel au chef de l’État et aux partenaires internationaux. Cette transparence, souvent réclamée par les donateurs, constitue un gage de crédibilité. À l’issue de l’audience du 30 juin, Adama Dian-Barry s’est dite « conquise par l’engagement politique qui sous-tend le projet ». Avec cette feuille de route, le Congo-Brazzaville confirme sa volonté d’inscrire la modernisation de la défense dans une démarche de développement durable et de sécurité collective.

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