Diplomatie culturelle et influence stratégique
À Brazzaville, la déclaration du ministre de la Communication et des Médias, Thierry Lézin Moungoulla, résonne comme un rappel de la vocation historique du Congo : faire converger la diplomatie culturelle et la vision sécuritaire. En soutenant la candidature de Firmin Edouard Matoko au poste de directeur général de l’UNESCO, le gouvernement choisit de projeter un soft power qui complète la puissance plus classique d’un État moderne. La culture, l’éducation et la science, domaines clé de l’organisation onusienne, deviennent ainsi des prolongements de la politique de défense nationale, puisqu’ils contribuent à la prévention des conflits et au renforcement de la cohésion sociale. « Nous défendons un projet capable de rapprocher les peuples et de consolider la paix », a insisté le porte-parole, soulignant la valeur stratégique d’un leadership congolais au sein d’une institution normative mondiale.
Le parcours de M. Matoko illustre cette symbiose. Cadre de l’UNESCO depuis trente-cinq ans, il a accompagné des programmes d’alphabétisation dans des zones post-conflit, dirigé des initiatives de sauvegarde du patrimoine menacé et plaidé pour l’inclusion numérique en Afrique centrale. Autant de chantiers où le dialogue culturel se révèle un instrument de stabilisation, complémentaire des opérations de sécurité menées par les forces armées congolaises dans les départements frontaliers ou le long du littoral du golfe de Guinée.
Une candidature au service de la paix et de la sécurité
L’UNESCO, souvent perçue comme une agence purement culturelle, joue en réalité un rôle déterminant dans l’architecture internationale de prévention des crises. Qu’il s’agisse de la protection des biens culturels lors d’opérations extérieures ou de la lutte contre les discours de haine en ligne, la future direction générale devra disposer d’une vision qui englobe la propriété intellectuelle, la mémoire collective et la cybersécurité. Le ministre Moungoulla a rappelé que l’élection d’octobre se déroulera « dans un contexte de fragmentation géopolitique où la légitimité des institutions multilatérales est questionnée ». Le choix d’un diplomate africain rompu aux arcanes de l’Organisation apporte une garantie de continuité et d’innovation.
Pour les chancelleries partenaires, soutenir Matoko revient à promouvoir une lecture élargie de la notion de sécurité : éduquer pour réduire la vulnérabilité face aux extrémismes, préserver le patrimoine pour empêcher l’effacement identitaire, encourager la recherche pour accroître la souveraineté technologique. Autant de priorités inscrites dans la Stratégie nationale de défense du Congo et alignées sur l’Agenda 2063 de l’Union africaine.
L’engagement des médias nationaux, vecteur de résilience informationnelle
En demandant aux rédactions d’accompagner activement la candidature congolaise, le gouvernement met en lumière un volet souvent négligé de la sécurité intérieure : la maîtrise de l’espace informationnel. La guerre cognitive, désormais reconnue par les états-majors, se gagne autant par le déploiement d’unités spécialisées que par la construction d’un récit national cohérent. « Nos journalistes sont les premières sentinelles de notre souveraineté ; ils doivent relayer la profondeur du projet congolais », a martelé le ministre.
Cette mobilisation des médias s’inscrit dans les réformes récentes visant à renforcer la coordination entre la presse, l’Agence nationale de renseignement et les cellules de communication des forces de défense. L’objectif est double : contrer les campagnes de désinformation susceptibles d’affaiblir la candidature et, plus largement, développer une culture stratégique partagée par les citoyens. En ce sens, l’élection à la tête de l’UNESCO devient un exercice grandeur nature de résilience nationale, préparant le pays aux défis informationnels du futur.
Synergies attendues avec les forces de défense
Si Firmin Edouard Matoko accède à la direction générale, plusieurs programmes pourraient immédiatement rencontrer les priorités des ministères congolais concernés. Le premier concerne la formation des officiers aux dimensions culturelles des opérations de maintien de la paix. Les académies militaires de Brazzaville et de Pointe-Noire travaillent déjà, avec l’appui de l’UNESCO, sur des modules dédiés à la protection du patrimoine en zone de crise, compétence de plus en plus requise dans les contingents africains déployés sous mandat onusien.
Le second domaine touche la cybersécurité. La convention de l’UNESCO sur l’éthique de l’intelligence artificielle, adoptée récemment, ouvre un espace de coopération avec la Direction générale de la cybersécurité congolaise afin de sécuriser les infrastructures critiques et de former des cadres à la gouvernance des données. Enfin, la question maritime n’est pas absente : la future université de la mer à Pointe-Noire pourrait bénéficier d’une labellisation UNESCO, renforçant l’attractivité du Congo dans le golfe de Guinée et permettant une meilleure coordination entre chercheurs civils et marine nationale sur la sûreté des routes énergétiques.
Regards extérieurs et consolidation du leadership africain
La tournée diplomatique effectuée par M. Matoko, accompagné de hauts responsables congolais, a déjà suscité des signaux positifs à Abidjan, Pretoria, Lagos ou Djibouti. Dans ces capitales, l’argument d’une Afrique parlant d’une même voix au sein du Conseil exécutif de l’UNESCO a trouvé un écho favorable. Pour nombre d’États membres, la candidature congolaise est perçue comme une occasion de rééquilibrer la gouvernance multilatérale et de projeter un agenda de développement centré sur la jeunesse.
Les observateurs estiment que le soutien affiché par les partenaires sud-américains et einige pays d’Asie du Sud-Est devrait également consolider la majorité requise lors du vote du 6 octobre. Au sein de la communauté de défense, cette perspective est accueillie avec satisfaction : un directeur général issu d’un pays du Golfe de Guinée pourrait faire de la lutte contre la piraterie maritime, la formation des casques bleus et la protection du cyberespace éducatif des priorités convergentes. Comme l’a conclu le porte-parole du gouvernement, « la candidature Matoko incarne notre conviction que la paix se construit d’abord par les esprits ; c’est notre contribution au système international de sécurité ».