Vers une gouvernance sécuritaire respectueuse des droits
En réunissant son Assemblée plénière du 22 au 26 septembre à Brazzaville, la Commission nationale des droits de l’homme (Cndh) engage le pays dans une séquence charnière où la culture militaire et policière se conjugue désormais avec l’exigence de conformité internationale. L’ambition est claire : décliner, sur l’horizon 2025-2028, un corpus d’actions mesurables permettant aux forces de défense et de sécurité de s’approprier les standards qui conditionnent aujourd’hui l’accès aux partenariats opérationnels, au financement et aux capacités de projection.
- Vers une gouvernance sécuritaire respectueuse des droits
- Une planification articulée aux doctrines des forces
- Le règlement intérieur : clé de la transparence des moyens
- Arrimage aux principes de Paris : un levier capacitaire
- Synergie avec la société civile : intelligence de situation
- Formation et entraînement : cap sur les 3 ans à venir
- Transparence et communication stratégique
- Enjeux régionaux et coopérations CEMAC
- Un élan présidentiel de modernisation
Une planification articulée aux doctrines des forces
Le document de stratégie, en cours de finalisation, ne se limite pas à un catalogue de recommandations juridiques. Il épouse la méthodologie propre aux états-majors : définition des effets recherchés, indicateurs de performance, chaîne de responsabilité et dispositif de contrôle. Pour Casimir Ndomba, président de la Cndh, « il s’agit de transformer une culture en procédures, puis en réflexes ». Les directeurs de la police, de la gendarmerie et de l’administration pénitentiaire ont d’ailleurs participé aux groupes de travail, conscients qu’une traçabilité rigoureuse des opérations est un gage de crédibilité dans les exercices conjoints CEMAC ou onusiens.
Le règlement intérieur : clé de la transparence des moyens
La session a également adopté un règlement intérieur modernisé qui précise la ventilation des ressources financières et humaines de l’institution. L’objectif est de rassurer les bailleurs stratégiques, au premier rang desquels les agences du Système des Nations unies représentées par Abdourahamane Diallo. À l’heure où la coopération sécuritaire se sophistique – drones ISR, plateformes de cyber-défense, systèmes d’information pénitentiaire – l’exigence de compliance budgétaire devient un préalable incontournable.
Arrimage aux principes de Paris : un levier capacitaire
Le coordonnateur onusien a rappelé que la future réforme législative alignant la Cndh sur les Principes de Paris ouvrirait des lignes de crédit multilatérales dédiées aux réformes structurelles des forces. Accès à des formations de police scientifique, financement de centres régionaux de droits humains pour la gendarmerie, modernisation du renseignement pénitentiaire : autant de volets qui renforceront la résilience intérieure et la projection extérieure, notamment dans les opérations de maintien de la paix où le Congo-Brazzaville déploie régulièrement des contingents.
Synergie avec la société civile : intelligence de situation
La Cndh entend s’appuyer sur le maillage associatif pour détecter précocement les signaux faibles de tension communautaire ou de criminalité organisée. Cette approche, inspirée du renseignement de sécurité intérieure, substitue à la dénonciation a posteriori une logique d’alerte partagée. Les rapports remontés par les ONG seront intégrés dans un tableau d’indicateurs piloté par un centre d’analyse commun Cndh-Intérieur, de manière à guider l’emploi des unités mobiles de la police et les patrouilles fluviales de la gendarmerie maritime.
Formation et entraînement : cap sur les 3 ans à venir
Le plan 2025-2028 prévoit un volet pédagogique ambitieux : modules obligatoires sur l’usage proportionné de la force, l’interrogatoire non coercitif et la gestion des preuves numériques. L’École de police de Chaminade et le Centre d’instruction commando de Loudima accueilleront des sessions conjuguant droit international humanitaire et drill tactique. « Le respect des droits n’est pas un frein mais un multiplicateur d’efficacité », souligne un officier formateur, rappelant que les fautes éthiques entraînent souvent un coût opérationnel élevé en matière d’image et de coopération.
Transparence et communication stratégique
Afin de contrer les campagnes informationnelles hostiles qui ciblent l’Afrique centrale, la Cndh engagera, de concert avec la Direction de la communication des armées, une stratégie proactive. Des rapports trimestriels publics, rédigés dans un style accessible, feront état des progrès, des enquêtes internes et des recommandations appliquées. Cette diplomatie de la preuve confortera la position du Congo-Brazzaville dans les fora continentaux, tout en consolidant la confiance de la population envers ses forces.
Enjeux régionaux et coopérations CEMAC
La piraterie dans le golfe de Guinée, les flux illicites d’armes transfrontalières et les défis cyber appellent une intégration fine des droits humains dans les dispositifs conjoints. Le plan stratégique de la Cndh prévoit la création d’une cellule de liaison avec le Centre interrégional de coordination de Yaoundé, chargée de mutualiser les pratiques d’enquête et de détention en mer. Dans un environnement où la judiciarisation des actes navals devient la norme, disposer de cadres harmonisés confère un avantage opérationnel déterminant.
Un élan présidentiel de modernisation
Ce chantier s’inscrit dans la dynamique impulsée par le président Denis Sassou Nguesso, attaché à la crédibilité internationale de l’appareil d’État et à la stabilité intérieure indispensable à l’émergence économique. Les forces de défense et de sécurité, en adoptant la grille de lecture de la Cndh, consolideront le continuum sécurité-développement, pilier de la Stratégie nationale de résilience. Casimir Ndomba résume ainsi l’esprit de la session : « Nous ne légiférons pas sur des textes, nous construisons un socle pour la paix durable ».