La sécurité des infrastructures critiques en première ligne
La dimension défense de ce pacte transparaît dans la priorité accordée aux sites sensibles : postes de transformation, centrales hydrauliques situées sur l’Alima ou le Kouilou, terminaux gaziers de la façade atlantique. Autant de points névralgiques dont la neutralisation aurait un impact direct sur la continuité des opérations militaires et sur la sûreté intérieure. Le ministère délégué à la Défense a ainsi prévu la création de détachements mixtes armée-gendarmerie pour sécuriser les chantiers puis les installations achevées. L’emploi de systèmes de vidéosurveillance intégrés au réseau fibre optique national, couplés à des capteurs électro-acoustiques, figure déjà dans le cahier des charges. Pour un officier de la direction du renseignement militaire, « assurer l’énergie, c’est protéger le nerf logistique qui soutient la mobilité de nos unités et la surveillance de nos côtes ».
- La sécurité des infrastructures critiques en première ligne
- Impacts opérationnels pour les forces armées congolaises
- Coopérations internationales et autonomie stratégique
- Enjeux industriels et contrôle logistique
- Vers une doctrine nationale de résilience énergétique
- Valoriser la dimension sociale pour consolider la paix
- Cap sur 2030 : un horizon sécurisé
Impacts opérationnels pour les forces armées congolaises
Le gain capacitaire attendu est considérable. Dans le nord, l’électrification des garnisons de Makoua et de Ouesso doit permettre la mise en service continue de radars de veille aérienne et de stations VHF, aujourd’hui tributaires de groupes électrogènes au rendement incertain. Sur la côte, la base navale de Pointe-Noire pourra compter sur une alimentation renforcée pour ses ateliers de maintenance et pour le futur centre de commandement maritime chargé de coordonner les patrouilles anti-piraterie dans le golfe de Guinée. Les Écoles de formation des officiers, notamment l’École supérieure de guerre de Brazzaville, bénéficieront quant à elles d’installations pédagogiques modernisées reposant sur des simulateurs gourmands en puissance. La manœuvre s’inscrit dans la logique de préparation opérationnelle énoncée par la loi de programmation militaire 2022-2026.
Coopérations internationales et autonomie stratégique
Si la participation des bailleurs internationaux reste structurante, les autorités congolaises recherchent un équilibre entre assistance et souveraineté. La signature attendue d’accords de transfert de technologie avec des industriels sud-coréens pour la production locale de transformateurs illustre cette volonté d’autonomisation. Parallèlement, la Commission CEMAC de défense et sécurité énergétique étudie la possibilité d’interconnexions régionales permettant des redondances en cas de crise. L’état-major congolais voit dans ces liaisons haute tension un atout pour projeter rapidement des renforts logistiques vers le Tchad ou la République centrafricaine lors d’opérations communes de maintien de la paix. Selon un diplomate du Comité des chefs d’état-major de la CEEAC, « l’énergie partagée devient un multiplicateur de puissance collective au bénéfice de la stabilité sous-régionale ».
Enjeux industriels et contrôle logistique
La modernisation énergétique ouvre un vaste marché estimé à plus de 1,5 milliard de dollars sur dix ans. Les sociétés nationales, telles que la Congolaise des voies fluviales et l’entreprise énergétique HydroCongo, seront mobilisées aux côtés de PME locales pour la construction de lignes, la distribution et la maintenance conditionnelle des équipements. Le ministère des Finances a insisté sur la mise en place d’un système de suivi contractuel visant à limiter la dépendance aux importations de pièces de rechange. Pour les forces armées, cette approche de supply-chain souveraine garantit la disponibilité des stocks stratégiques en cas de tension géopolitique. Elle contribue également à contrer les réseaux de contrebande de carburant, souvent identifiés comme vecteurs de financement des groupes criminels.
Vers une doctrine nationale de résilience énergétique
Au-delà des infrastructures, le Pacte national énergétique inaugure une véritable culture de la résilience. La Direction générale de la sécurité civile prépare des plans de continuité qui envisagent la production décentralisée via des micro-réseaux solaires dans les zones forestières, offrant ainsi aux détachements frontaliers une autonomie électrique synonyme de gain opérationnel. L’Institut national de recherche en sciences et technologies appliquées élabore de son côté des protocoles de cybersécurité adaptés aux postes de contrôle SCADA, conscients que les centrales électriques sont des cibles privilégiées des cyberattaques. « Nous inscrivons la sécurité numérique au même rang que la protection physique des ouvrages », résume son directeur, rappelant l’adhésion récente du Congo au Comité africain de cybersécurité.
Valoriser la dimension sociale pour consolider la paix
En facilitant l’accès à l’électricité domestique et à l’éclairage public, le pacte devrait diminuer la vulnérabilité des populations aux trafics informels et aux actes de banditisme, particulièrement dans les quartiers périphériques de Brazzaville et de Pointe-Noire. L’expérience menée à Ngoyo, où la baisse de délestages a réduit de 18 % les incidents nocturnes signalés aux forces de police, illustre la corrélation positive entre électrification et stabilité. Là réside la plus-value stratégique du projet : gagner la paix intérieure par le développement. À entendre un cadre du Haut-Commissariat à la réinsertion des ex-combattants, « une ampoule qui s’allume vaut parfois plus qu’un bataillon déployé ».
Cap sur 2030 : un horizon sécurisé
Avec le Pacte national énergétique, le Congo-Brazzaville articule, dans un même mouvement, modernisation économique, renforcement des capacités militaires et cohésion sociale. Le triptyque énergie-défense-sécurité devient la colonne vertébrale de la stratégie nationale, conforme à la vision présidentielle d’un État résilient et souverain. À l’aube de 2030, l’électrification promise apparaîtra non seulement comme un indicateur de développement, mais aussi comme un révélateur de puissance publique, capable de protéger son territoire, d’assurer la sécurité de ses citoyens et de coopérer d’égal à égal avec ses partenaires régionaux.