IATF 2025: essor stratégique pour la défense congolaise

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Diplomatie économique et souveraineté sécuritaire

Du 4 au 10 septembre 2025, Alger accueille pour la première fois la Foire commerciale intra-africaine, rendez-vous où plus de deux mille exposants issus de soixante-quinze pays, accompagnés de délégations provenant de cent quarante États, présentent des opportunités de marché évaluées à quarante-quatre milliards de dollars. En confiant au ministre d’État Alphonse Claude N’Silou le soin de représenter la République du Congo, le Président Denis Sassou-Nguesso inscrit cette manifestation commerciale dans une lecture résolument stratégique : la sécurité nationale s’appuie d’abord sur la robustesse des échanges, la maîtrise de l’approvisionnement et la résilience industrielle.

Le message est clair : la diplomatie économique est l’avant-poste d’une souveraineté sécuritaire. L’enjeu ne se résume pas à élargir les parts de marché, encore limitées à quinze pour cent des échanges inter-africains, mais à garantir un accès continu aux biens critiques pour la défense, qu’il s’agisse de matériaux, de capacités de maintenance ou de technologies duales.

Des échanges commerciaux aux capacités logistiques

Dans son allocution d’ouverture, le Président Abdelmadjid Tebboune a rappelé que l’Afrique ne détient que six pour cent des droits de vote au FMI et onze pour cent à la Banque mondiale, tandis que ses parts dans le commerce mondial peinent à dépasser trois pour cent. Pour les états-majors comme pour les autorités civiles congolaises, cette marginalité signifie une dépendance potentiellement préjudiciable lorsque surviennent des crises d’approvisionnement ou des chocs géopolitiques.

Les déficits portuaires, énergétiques et de transport pointés par le chef de l’État algérien font écho aux réflexions menées à Brazzaville sur l’autonomie logistique des forces. La perspective de conclure, dans le cadre de l’IATF, des accords facilitant la circulation intra-africaine des pièces détachées, des carburants spécialisés ou des équipements de protection individuelle s’inscrit donc dans une logique de préparation opérationnelle.

Le rôle moteur du ministre d’État N’Silou

La délégation congolaise menée par Alphonse Claude N’Silou, ministre du Commerce, des Approvisionnements et de la Consommation, a été reçue à Alger par son homologue Kamel Rezig. Au-delà du caractère protocolaire, cette rencontre souligne la continuité entre chaînes d’approvisionnement civiles et chaînes de soutien militaire. À l’heure où la logistique est, selon la formule consacrée, le « nerf de la guerre », la tutelle du commerce apparaît comme un partenaire naturel de la Défense pour sécuriser la base industrielle et technologique nationale.

L’implication personnelle du ministre d’État conforte l’orientation présidentielle : multiplier les partenariats africains pour réduire les dépendances extrarégionales. En favorisant des contrats libellés en monnaies locales, encouragés par Afreximbank et par le Secrétariat général de la ZLECAf, Brazzaville se dote d’outils de protection contre les fluctuations monétaires susceptibles d’affecter les budgets de la Défense.

Synergies continentales pour la résilience stratégique

La présence de chefs d’État tels que Kaïs Saied, Mahamat Idriss Déby Itno ou Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani confère à l’évènement une dimension politique qui dépasse la seule vitrine commerciale. Les discussions bilatérales en marge de la foire constituent autant d’occasions d’harmoniser normes de certification, procédures douanières et plans de transport. À terme, ces convergences techniques renforcent l’interopérabilité entre armées africaines lors des opérations conjointes de maintien de la paix ou de sécurisation des corridors économiques.

La décision algérienne d’annuler 1,5 milliard de dollars de dettes détenues par quatorze pays africains témoigne également d’une solidarité budgétaire dont pourraient bénéficier des programmes capacitaires régionaux. La logique est simple : soulager des marges financières pour mieux réinvestir dans la modernisation des forces et dans la création d’emplois industriels à forte valeur ajoutée.

Perspectives pour l’appareil de défense national

En phase avec la Loi de programmation militaire nationale, qui insiste sur la maintenance conditionnelle et la montée en puissance des compétences locales, la participation à l’IATF 2025 ouvre un champ d’action supplémentaire. L’accès à un réseau de trente-cinq mille visiteurs professionnels autorise un repérage fin des fournisseurs africains capables de répondre aux exigences de qualité définies par les autorités congolaises.

À moyen terme, l’objectif est de consolider un écosystème régional qui assure la disponibilité des équipements, favorise le transfert de savoir-faire et soutienne l’innovation. L’arbitrage budgétaire entre engagement opérationnel et soutien à l’industrie sera d’autant plus soutenable que les solutions proviendront de circuits raccourcis, moins exposés aux tensions géostratégiques globales.

Ainsi, la Foire commerciale intra-africaine d’Alger, tout en demeurant un évènement économique de premier plan, s’impose également comme un jalon discret mais déterminant sur la route de la souveraineté sécuritaire du Congo. Sous l’autorité du Président Denis Sassou-Nguesso, la diplomatie économique se double d’une diplomatie capacitaire qui, à terme, consolidera la posture défensive du pays et la stabilité régionale.

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