Océan congolais : sécurité et croissance en jeu

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Façade maritime congolaise, enjeu stratégique

La célébration de la Journée internationale de la mer, le 25 septembre à Brazzaville, résonne cette année comme un rappel attentif du poids stratégique que représente la façade atlantique de cent soixante-dix kilomètres dont dispose la République du Congo. En répétant que « l’océan est à la fois une richesse et une responsabilité », la ministre des Transports, de l’Aviation civile et de la Marine marchande, Ingrid Olga Ghislaine Ebouka Babackas, a posé un cadre qui dépasse la simple sensibilisation écologique. Dans le langage des états-majors, l’océan se lit aussi en termes de profondeur stratégique, de liberté de navigation et de résilience logistique. À l’heure où plus de quatre-vingt-dix pour cent des flux commerciaux mondiaux empruntent la voie maritime, garantir la sûreté de cette porte océane revient à sécuriser la trajectoire de diversification économique voulue par Brazzaville. Le discours gouvernemental balaie ainsi d’un même geste l’impératif environnemental et l’indispensable sécurisation des approches maritimes.

Sécurité et sûreté : priorités marquées pour 2025

La déclaration ministérielle place le renforcement de la sécurité et de la sûreté du transport maritime en tête des réformes en cours. Moderniser les infrastructures portuaires, accroître la surveillance des navires et élever les standards de contrôle constituent les trois volets d’un plan qui s’inscrit dans l’horizon 2025 défini par la Direction générale de la marine marchande. Cette approche répond aux pressions évoquées par la ministre : surexploitation des ressources halieutiques, pollution plastique ou pétrolière, hausse du niveau des mers. Chaque menace environnementale possède en effet son corollaire sécuritaire. Un navire non contrôlé est à la fois un risque pour l’écosystème et pour l’ordre public. De la compatibilité des équipements de contrôle avec les exigences de l’Organisation maritime internationale dépend la faculté du Congo à vérifier les cargaisons, à lutter contre les rejets illicites et, plus largement, à maintenir une réputation de place portuaire fiable.

Vigilance environnementale et posture navale

En insistant sur la responsabilité collective face aux pollutions, la responsable gouvernementale renvoie les administrations civiles et les composantes armées à une obligation de vigilance permanente. La montée en puissance des dispositifs de surveillance maritime constitue, dans ce contexte, le bras armé de la politique environnementale. La lutte contre les hydrocarbures déversés en mer, la détection des émissions polluantes et la prévention de la pêche illégale supposent une coordination fine entre la marine marchande, les gardes côtes et les services de contrôle des pêches. Brazzaville rappelle ici que la protection de l’océan ne relève pas d’une posture morale abstraite mais d’une action inter-services où la maîtrise du renseignement de situation, l’aptitude à l’arraisonnement et la judiciarisation rapide des infractions forgent la crédibilité de l’État. Sur ce segment, la modernisation technique annoncée vise autant l’environnement que la dissuasion des trafics transnationaux.

Croissance bleue : enjeux industriels et emploi

L’autre message fort du gouvernement tient dans l’affirmation de l’océan comme facteur d’emploi, d’alimentation, d’énergie et de biotechnologies. Lier protection écologique et opportunités économiques procède d’une doctrine de croissance bleue dans laquelle la sûreté maritime n’est pas un coût, mais un multiplicateur de valeur. Le port en expansion mentionné dans la déclaration – porte d’entrée vers l’arrière-pays continental – illustre cette équation : plus la chaîne logistique est sûre, plus elle attire d’investissements. La mise à niveau des terminaux, le renforcement des dispositifs anti-incendie, la disponibilité de remorqueurs polyvalents et la capacité à traiter les effluents répondent simultanément à des critères commerciaux et à des normes de défense civile. La même logique vaut pour les pêcheries, dont la gestion durable conditionne la sécurité alimentaire et l’emploi côtier. Maintenir la souveraineté sur la ressource passe, là encore, par un contrôle effectif des zones de pêche.

Responsabilité partagée et diplomatie des normes

La conclusion de la ministre, rappelant que préserver l’océan constitue « une obligation morale envers les générations futures », confère une dimension diplomatique à l’effort national. Le Congo, État ribier au Golfe de Guinée, fait valoir sa volonté d’alignement sur la réglementation internationale comme levier d’influence. En mettant en avant la mise en œuvre de la gestion durable des ressources et la réduction des gaz à effet de serre émis par les navires, Brazzaville se positionne dans le débat mondial sur la décarbonation du shipping. Cette posture normative consolide l’image d’un pays soucieux de stabilité, condition préalable à toute coopération militaire et technique. En martelant que la préservation des mers est un projet collectif, le gouvernement engage aussi les opérateurs privés, les communautés côtières et les partenaires étrangers à prendre part au renforcement de la sécurité maritime congolaise. De la convergence de ces engagements dépendra la pleine valorisation de la façade atlantique nationale.

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