Assa-AC : Brazzaville leader de la sûreté aérienne

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Enjeux sécuritaires du ciel d’Afrique centrale

La maîtrise collective de l’espace aérien constitue l’un des piliers de la stabilité en Afrique centrale. Entre la lutte contre les trafics transfrontaliers, la sécurisation des flux économiques et la prévention des menaces terroristes, la sûreté des vols civils dialogue désormais avec les impératifs strictement militaires de défense aérienne. C’est dans ce contexte que l’Agence de supervision de la sécurité aérienne en Afrique centrale, l’Assa-AC, a tenu à Brazzaville sa septième session ordinaire du Comité des ministres. L’événement, accueilli par le gouvernement congolais, a permis d’approuver un plan d’action et un projet de budget pour 2026 conçus comme une véritable feuille de route stratégique. « Le ciel de la Cémac doit être à la fois un corridor économique sûr et un écran radar commun », a souligné la ministre des Transports, de l’Aviation civile et de la Marine marchande, Ingrid Olga Ghislaine Ebouka-Babackas, désormais présidente du Comité.

Leadership congolais et gouvernance régionale

En confiant la présidence de l’Assa-AC à Brazzaville, les États membres reconnaissent la diplomatie d’influence que déploie le Congo-Brazzaville dans les questions de transport et de défense. L’hôte de la réunion a su fédérer les capitales autour d’une mise en œuvre accélérée de la Redevance de sûreté aérienne régionale, déjà appliquée dans cinq pays. Cet instrument financier, collecté via l’Association internationale du transport aérien, garantit des ressources pérennes pour les inspections, la certification des appareils et l’interopérabilité des centres de contrôle. À terme, cette convergence réglementaire favorisera également le partage de données radar avec les antennes militaires, offrant une couverture plus fine contre les incursions illicites. « Nous renforçons la mutualisation des moyens sans obérer la souveraineté de chacun », a rappelé Eugène Apombi, directeur général de l’Agence.

Capacité budgétaire et discipline financière

L’approbation du projet de budget 2026 s’accompagne d’exigences de rigueur. Les arriérés de certaines contributions nationales avaient, par le passé, ralenti plusieurs inspections in situ. Le Comité des ministres a donc posé la règle d’une trajectoire descendante des dépenses de fonctionnement, couplée à une obligation de certification annuelle des comptes avant envoi aux Cours des comptes nationales. Cette gouvernance vertueuse consolide la crédibilité de l’Assa-AC auprès des bailleurs, mais aussi des forces armées qui exploitent en temps réel les bulletins de sûreté édités par l’Agence pour calibrer leurs propres plans de vol. L’effort budgétaire porte en particulier sur la modernisation des laboratoires de contrôle des radionavigation et sur le déploiement de stations ADS-B, technologie indispensable à la détection précoce d’aéronefs non coopératifs.

Formation triennale : socle de souveraineté technique

Le déficit de compétences est souvent le maillon faible des chaînes de sécurité africaines. Le plan 2026-2028 adopté à Brazzaville prévoit la formation de cent cinquante inspecteurs, ingénieurs et juristes aéronautiques, dont un tiers sera accueilli à l’École africaine de la météorologie et de l’aviation civile de Pointe-Noire. La priorité portera sur la qualification aux audits de la sûreté, la maîtrise du Programme national de sécurité et l’harmonisation des sanctions administratives. Pour les États, il s’agit aussi de créer un vivier de formateurs capables d’appuyer les aéronefs gouvernementaux ou militaires lors des exercices conjoints. À moyen terme, cette montée en gamme réduira le recours systématique à des prestataires extérieurs, valorisant ainsi l’expertise congolaise tout en promouvant une autonomie stratégique régionale.

Migration réglementaire et résilience collective

La date butoir du 31 décembre 2026 fixée pour l’achèvement de la transition vers les règlements communautaires constitue un jalon critique. Elle conditionne l’interopérabilité des bases de données aéronautiques, la reconnaissance mutuelle des licences et, in fine, la capacité des armées de la région à coordonner des opérations d’assistance ou d’évacuation. Conscients des lenteurs législatives, les ministres ont demandé une délégation exceptionnelle au Conseil de l’Union économique d’Afrique centrale afin de simplifier la procédure de ratification. La révision de l’organigramme de l’Agence, avec la nomination du Congolais Leyami Gastel Aimard à la direction administration-finances, traduit la volonté de doter l’Assa-AC d’une chaîne décisionnelle plus agile et plus réactive aux crises.

Perspectives pour la défense aérienne régionale

Au-delà de la stricte sécurité des vols civils, l’architecture que déploie l’Assa-AC servira de socle à une défense aérienne intégrée, complémentaire des dispositifs militaires existants. L’échange en temps réel des plans de vol, l’installation de balises de surveillance basées au sol et la certification des aéroports aux normes OACI permettront une projection plus sûre des forces engagées dans les opérations de maintien de la paix. Portant la voix de la Cémac, Brazzaville entend faire de cette réussite un argument clé dans les futures négociations de partenariat avec les constructeurs aéronautiques et les fournisseurs de solutions ISR. À l’issue de la session, la ministre Ebouka-Babackas a conclu : « En sécurisant nos couloirs aériens, nous consolidons notre souveraineté et offrons aux populations comme aux investisseurs une garantie de stabilité. C’est là le sens profond de l’engagement du président Denis Sassou Nguesso pour une Afrique centrale plus sûre et plus prospère. »

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