Le génie logistique de la DGFE au service de la cité
Tôt à l’aube, les chenilles des chargeuses et des compacteurs frappés des couleurs de la Direction générale des finances et de l’équipement se sont mises en branle dans Makélékélé, Bacongo puis Ouenzé. Le ballet des engins, ordonné par le commissaire colonel-major Michel Innocent Peya, rappelle que la police nationale n’est pas seulement une force de coercition : elle dispose aussi d’une chaîne logistique capable de projeter, en quelques heures, plusieurs détachements d’ingénierie civile. Cette mise à contribution des moyens techniques de la DGFE illustre la polyvalence d’un service souvent cantonné aux marges budgétaires mais dont l’expertise mécanique et l’atelier central se révèlent décisifs pour la sauvegarde du cadre de vie.
Au-delà du simple enlèvement des montagnes de déchets qui asphyxiaient les collecteurs, l’opération vise le rétablissement de la fluidité urbaine, condition sine qua non de la mobilité des forces de sécurité et des services d’urgence. En libérant l’avenue Simon-Kimbangu ou les abords du marché Total, la DGFE garantit la circulation des patrouilles, des ambulances et des convois logistiques, autant d’éléments indispensables à la posture de sûreté intérieure voulue par le ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation.
Synergie police-population : un protocole d’hygiène sécuritaire
Sous le regard approbateur des riverains, policiers mécaniciens, conducteurs et spécialistes NBC échangent avec les comités de quartier sur les bonnes pratiques de tri et de dépôt. La scène surprend par sa cordialité : ici, les uniformes créent un espace de dialogue plutôt qu’un rapport de force. En liant assainissement et prévention sanitaire, la DGFE renforce la relation de confiance sans laquelle aucune veille citoyenne ne peut prospérer. Cette approche communautaire épouse la doctrine nationale de police de proximité que développe depuis plusieurs années la direction générale de la sûreté nationale.
S’il est admis que l’insalubrité alimente vecteurs pathogènes et délinquance opportuniste, l’action conjointe des forces et des habitants réduit simultanément le risque de maladies hydriques et celui d’occupation illégale de la voie publique. Les témoignages recueillis traduisent un sentiment de sécurité renouvelé : les commerçants du marché Total affirment que le dégagement des ordures repousse pickpockets et revendeurs clandestins que la pénombre des dépotoirs abritait, preuve que l’hygiène s’érige en première ligne de la prévention criminelle.
Capacité opérationnelle et doctrine de projection intérieure
Pour la DGFE, l’opération constitue un cas d’école de projection rapide de moyens lourds à l’intérieur du territoire national. Les colonnes de camions-bennes formées rue de la Base navale ont été escortées par des motocyclistes de la Compagnie mobile d’intervention. Cette coordination inter-services démontre la montée en puissance d’une doctrine logistique intégrée, capable de soutenir des manœuvres humanitaires, des déploiements de maintien de l’ordre ou des secours en cas de catastrophe naturelle. L’expérience acquise sera capitalisée dans les exercices interarmées que l’état-major prévoit sur la rive droite du fleuve Congo.
Sur le plan capacitaire, l’investissement dans des niveleuses, des citernes de lavage et des stations mobiles de décontamination répond à deux nécessités : d’une part, l’entretien permanent des infrastructures routières indispensables aux déplacements stratégiques ; d’autre part, la maîtrise des risques NRBC, compétence que le régiment de protection civile souhaite internaliser. La convergence entre assainissement civil et préparation opérationnelle confère à la DGFE la flexibilité attendue des forces de sécurité contemporaine.
Enjeux sanitaires et résilience urbaine stratégique
Brazzaville, naguère surnommée « la verte », avait vu sa canopée urbaine céder le pas à des monticules d’immondices dont la prolifération inquiétait les services épidémiologiques. Or une capitale exposée aux flambées de choléra ou de fièvre typhoïde fragilise sa gouvernance autant que son attractivité économique. En restaurant des conditions sanitaires décentes à l’orée de la grande saison des pluies, la DGFE participe à la stratégie nationale de résilience édictée par le Plan de développement 2022-2026. La santé de la population, rappelait récemment le ministre Raymond Zéphirin Mboulou, est un socle de la sécurité collective.
Les statistiques du Service de santé des armées confirment qu’une réduction de 30 % des foyers d’ordures dans les arrondissements sud diminue mécaniquement la prévalence des maladies hydriques dans les casernes environnantes. Moins de personnels convalescents signifie davantage de forces disponibles pour les patrouilles mixtes et les détachements de maintien de la paix. L’assainissement cesse dès lors d’être perçu comme un supplément d’âme municipal ; il devient un multiplicateur d’effets opérationnels pour la défense nationale.
Perspectives : vers une gouvernance intégrée des déchets
Au terme des premières vagues de nettoyage, la DGFE et la mairie de Brazzaville étudient la création d’un centre de coordination opérationnelle dédié aux déchets solides urbains. L’idée, soutenue par la coopération turque, consiste à mutualiser les cartographies satellitaires, les drones ISR civilo-policiers et les plateformes de signalement citoyen. Une telle structure permettrait d’anticiper les points chauds avant leur saturation et d’optimiser la rotation des engins, tout en fiabilisant les audits environnementaux imposés par les partenaires internationaux.
La démarche s’inscrit dans la vision du président Denis Sassou Nguesso, qui fait de la modernisation des services publics un levier de stabilité. À moyen terme, l’intégration des industriels locaux de la filière plastique et organique devrait valoriser la composante recyclage et créer un marché d’approvisionnement pour les forces armées en matériaux composites. Ainsi se dessine un cercle vertueux où la défense, la sécurité intérieure et le développement durable convergent pour hisser de nouveau la capitale congolaise au rang de référent environnemental en Afrique centrale.
