À Pointe-Noire, la sécurité au service de l’écologie
L’arrêt inattendu des opérateurs privés du nettoiement urbain a généré, en quelques semaines, une accumulation de déchets inédite dans la capitale économique. Rues embouteillées par les ordures, marchés envahis par les nuisances olfactives : la situation a rapidement basculé d’un enjeu de voirie à une menace directe pour la santé publique. Conformément aux directives du président Denis Sassou Nguesso, le colonel-major Michel Innocent Peya, directeur général des Finances et de l’Équipement de la Police nationale et de la Gendarmerie, a engagé l’Unité d’assainissement et de protection de l’environnement pour restaurer la salubrité. Cette projection militaire hors des casernes rappelle que la sécurité intérieure ne se limite plus au maintien de l’ordre, mais intègre désormais la défense du milieu de vie des citoyens.
Projection rapide des moyens de la DGFE
Appuyée par une chaîne logistique bâtie sur les standards du soutien opérationnel, la DGFE a mis moins de vingt-quatre heures pour acheminer chargeuses, compacteurs et camions-bennes depuis son dépôt central. Les détachements de génie civil, organisés en sections modulaires, ont quadrillé Tié-Tié, Mvou-Mvou puis Ngoyo selon un plan de manœuvre comparable à celui d’une opération de stabilisation. L’exploitation d’un système de commandement numérisé, développé à l’origine pour la gestion du parc automobile de la Police nationale, a permis de suivre en temps réel les rotations et d’optimiser les points de collecte. Cette réactivité illustre la polyvalence d’un service souvent perçu comme administratif, mais dont les capacités mécanisées constituent un atout stratégique pour la résilience urbaine.
Effets opérationnels : santé publique et résilience urbaine
La saison des pluies augmente le risque de propagation du choléra, de la typhoïde et du paludisme. En supprimant les gîtes larvaires et en libérant les caniveaux, la DGFE contribue à couper la chaîne de transmission des maladies hydriques. L’opération a également neutralisé un facteur critique : les dépôts d’ordures sous les lignes à haute tension reliant Pointe-Noire à Brazzaville. L’incendie de ces immondices, solution de fortune utilisée par certains riverains, menaçait l’alimentation électrique de la zone industrielle et des infrastructures stratégiques du port en eau profonde. En à peine une semaine, plus de 1 800 tonnes de déchets ont été évacuées, réduisant d’autant la vulnérabilité énergétique de la ville et sécurisant la continuité des activités économiques.
Renforcement du lien armée-nation
Au marché de la Liberté, les commerçantes ont spontanément offert de l’eau aux agents en tenue tout en scandant « Force publique, peuple uni ». Ce geste, simple mais puissant, traduit le retour d’une confiance que nourrissent les opérations de proximité conduites depuis 2023 à Brazzaville puis Dolisie. Le maire de Tié-Tié, saluant « l’alliance vertueuse entre discipline militaire et civisme urbain », y voit un modèle de gouvernance partagée. Pour les forces, l’exercice constitue un entraînement grandeur nature au déploiement interservices ; pour les civils, il démontre que la défense de la nation commence au coin de la rue. Cette dimension psychologique, essentielle à la doctrine congolaise de défense, consolide la cohésion sociale, socle de toute sécurité durable.
Vers une doctrine congolaise de sécurité environnementale
Créée par décret en février 2025, l’Unité d’assainissement n’était initialement chargée que de l’hygiène des casernes. L’expérience de Pointe-Noire montre qu’elle peut devenir le pivot d’une stratégie plus large alliant développement durable, gestion des catastrophes et sûreté urbaine. Le ministère de l’Intérieur étudie déjà la possibilité d’intégrer ces capacités dans les plans ORSEC et dans la coopération régionale CEMAC pour la lutte contre les épidémies transfrontalières. « En protégeant l’environnement, nous renforçons la paix civile », résume le colonel-major Peya, reprenant la maxime présidentielle d’un « Congo propre, discipliné et durable ». À l’heure où le Golfe de Guinée recherche des réponses intégrées aux défis sécuritaires, l’action de la DGFE préfigure une doctrine où l’écologie devient un champ de manœuvre à part entière pour les forces de sécurité.
