Une arrivée saluée par les cercles de sécurité stratégique
La décision, annoncée discrètement dans les cercles ministériels, fait déjà bruisser les chancelleries : Deve Maboungou prend les rênes de la direction de l’Intelligence économique et des Stratégies d’Influence au sein du Comité consultatif international de la Commission de Développement Économique du Congo (CDECO). Pour Brazzaville, il ne s’agit pas d’une simple nomination mais bien d’un jalon supplémentaire dans la consolidation d’un appareil d’État axé sur l’anticipation des risques, la sécurisation des chaînes de valeur et la projection d’influence. « Le pays dispose désormais d’une boussole qui conjugue renseignement économique, diplomatie et sécurité intérieure », confie, sous couvert d’anonymat, un officier supérieur au sein de la Direction générale de la documentation et de l’immigration.
Âgé de quarante ans, le franco-congolais apporte quinze années d’expérience acquises au croisement des études stratégiques, de la diplomatie économique et de la gestion des risques. Fondateur du cabinet Noeîn & Cie, ancien animateur de la Maison de l’Afrique à Paris et représentant du Congo dans plusieurs réseaux d’influence, il s’est forgé la réputation d’un stratégiste capable de lire les signaux faibles et de nouer des alliances improbables. Sa récente désignation comme Ow’Isaza, représentant du royaume ougandais de Bunyoro-Kitara auprès de la République française, atteste d’une agilité diplomatique rare.
Rapprocher diplomatie économique et doctrine de défense
Dans la vision exposée par la CDECO, l’intelligence économique n’est plus cantonnée à la veille concurrentielle. Elle interpelle désormais l’architecture globale de sécurité nationale. Le ministère de la Défense rappelle régulièrement que la première vulnérabilité d’un État peut être informationnelle. Dépendance technologique, pression sur les matières premières critiques, capture de données : autant de menaces qui justifient la fusion des boîtes à outils entre diplomates, industriels et forces de sécurité.
Le général de brigade Flavien Boulingui, conseiller pour la planification capacitaire, souligne que « l’influence est devenue une fonction stratégique au même titre que le feu ou la manœuvre ». La présence de Maboungou au sein de la CDECO crée un pont opérationnel entre le Centre national de renseignement, le ministère du Commerce extérieur et les attachés de défense accrédités à l’étranger. Cette transversalité doit accroître la pertinence des notes d’alerte transmises aux décideurs et fluidifier la réponse étatique face aux pressions économiques de puissances tierces.
CDECO, catalyseur de partenariats industriels sécurisés
Institution conseillère du gouvernement, la CDECO ambitionne d’orchestrer la diversification économique tout en protégeant les intérêts stratégiques du pays. Sous l’impulsion de son président, l’organe élabore des feuilles de route sectorielles qui lient attractivité investisseurs et exigences de souveraineté. La nouvelle direction confiée à Maboungou aura pour mandat d’insérer une culture du « doute raisonné » dans la sélection des partenaires.
Les infrastructures portuaires, la logistique pétrolière et les plateformes énergétiques offshore demeurent des cibles privilégiées de la criminalité transnationale. En intégrant des matrices de risques élaborées selon les standards militaires – de la menace physique à la compromission cyber – la CDECO veut prémunir le Congo-Brazzaville contre les chausse-trapes contractuelles et les tentatives de capture de technologie. Des due-diligences renforcées, adossées à des cellules d’enquête financière, devraient être systématisées avant tout grand marché public.
Priorités : filières critiques, cyberdéfense et maintien en condition
Dès le mois prochain, la feuille de route du nouveau directeur devrait se traduire par la mise en place d’un tableau de bord stratégique centré sur trois axes. Le premier concerne la sécurisation des filières critiques, notamment le bois de haute valeur et le manganèse, où la fluctuation des cours peut déstabiliser des régions entières. Le deuxième axe renvoie à la cyberdéfense. Face à la multiplication des attaques par rançongiciel visant les administrations, la CDECO testera un protocole d’échanges sécurisés entre opérateurs économiques essentiels et la cellule de réponse du ministère de l’Intérieur.
Enfin, la question du maintien en condition opérationnelle (MCO) des équipements militaires importés demeure sensible. Au-delà de la disponibilité technique, c’est l’autonomie de programmation qui est en jeu. L’expertise de Maboungou, qui a conseillé plusieurs PME duales européennes, pourrait faciliter la conclusion d’accords de transfert de compétences, réduisant la dépendance aux fournisseurs étrangers pour les pièces critiques.
Une approche réseau pour consolider l’influence régionale
Le rôle de représentant du royaume de Bunyoro-Kitara confère à Maboungou une connaissance fine des dynamiques d’Afrique de l’Est. Or, les corridors commerciaux entre l’océan Indien et le Golfe de Guinée deviennent cruciaux pour l’approvisionnement en hydrocarbures et pour la projection des forces de maintien de la paix. La CDECO entend capitaliser sur ces réseaux pour amplifier la voix de Brazzaville dans les enceintes CEMAC, mais aussi au sein de l’Union africaine où se négocient les standards de sûreté maritime.
Au plan domestique, cette diplomatie d’influence sera prolongée par des formations conjointes entre officiers des douanes, policiers et cadres du ministère des Affaires étrangères. Objectif : bâtir un langage commun de la protection économique. « Nous voulons passer d’alertes dispersées à une intelligence partagée, orientée vers l’action d’État », résume un haut fonctionnaire de la Primature. En confiant la boussole à Deve Maboungou, le Congo-Brazzaville confirme sa volonté de conjuguer résilience économique et ambition stratégique, dans un environnement international toujours plus compétitif.
