Brazzaville au cœur de la coordination régionale
Le 2 décembre, le Centre de coordination régional d’Africa CDC pour l’Afrique centrale a tenu à Brazzaville sa deuxième réunion de comité de pilotage. Sous l’égide du ministre congolais de la Santé et de la Population, le professeur Jean Rosaire Ibara, les délégations ont endossé un plan qui dépasse le seul champ biomédical : il s’agit de consolider un véritable bouclier stratégique face aux urgences de santé, vecteur potentiel de déstabilisation politique et socio-économique. « Nous avons identifié et hiérarchisé les activités prioritaires nécessaires pour consolider notre sécurité sanitaire collective », a rappelé le professeur Ibara en clôturant les travaux.
- Brazzaville au cœur de la coordination régionale
- Africa CDC : un outil stratégique de résilience régionale
- De la veille épidémiologique à la sûreté transfrontalière
- Financements domestiques, un levier de souveraineté
- Priorités opérationnelles sous présidence tchadienne
- Enjeu industriel : cap sur 60 % de production locale
Africa CDC : un outil stratégique de résilience régionale
En présentant le communiqué final, le docteur Brice Bicaba, directeur régional d’Africa CDC pour l’Afrique centrale, a insisté sur la nécessité de « construire une architecture solide de préparation et de réponse aux urgences sanitaires ». L’expression revêt un sens particulier pour les appareils de défense et de sécurité : la résilience face aux épidémies conditionne la disponibilité opérationnelle des forces, la crédibilité des missions de maintien de la paix et la stabilité intérieure. L’exigence de coordination portée par Africa CDC rejoint donc les priorités du gouvernement congolais, toujours prompt à conjuguer sécurité humaine et sécurité nationale sous l’impulsion du président Denis Sassou Nguesso.
De la veille épidémiologique à la sûreté transfrontalière
La réunion a accordé une place centrale à la surveillance et à la gestion des urgences dans les zones transfrontalières, espaces souvent poreux où les dynamiques épidémiques se superposent aux trafics illicites. La stratégie régionale de transport des échantillons, discutée par les experts, s’apparente à une véritable chaîne logistique de défense biologique, exigeant des corridors sécurisés, des capacités de projection rapides et un partage en temps réel de l’information sensible. « Un accord de partage de données entre Africa CDC et les États membres est une condition essentielle pour une surveillance efficace et une anticipation optimale des risques », a souligné le professeur Ibara. Les services de renseignement sanitaire rejoignent ainsi les cellules de renseignement intérieur et militaire dans un même impératif de fusion des capteurs.
Financements domestiques, un levier de souveraineté
Les États ont convenu d’accroître les financements domestiques et de mobiliser des mécanismes innovants pour garantir une réponse durable. Derrière le vocabulaire financier se dessine l’enjeu de souveraineté : dépendre d’aides extérieures lors d’une crise sanitaire majeure fragilise l’autonomie stratégique et peut ralentir la prise de décision. L’engagement budgétaire national, défendu par Brazzaville, épouse donc la logique de sécurisation des approvisionnements vitaux et de protection des infrastructures critiques. « En unissant nos forces, nous pouvons construire une Afrique centrale capable non seulement de répondre aux crises mais aussi de les prévenir », a déclaré le professeur Yap Boum II, représentant du directeur général d’Africa CDC.
Priorités opérationnelles sous présidence tchadienne
La passation de la présidence du comité de pilotage du Congo au Tchad traduit la maturité institutionnelle du mécanisme. « Le Tchad s’engage à être un facilitateur et un catalyseur pour que ce mandat porte ses fruits », a affirmé l’ambassadeur Abdel-Kerim Ahamadaye Bakhit. Cette alternance ouvre une phase d’exécution où seront testées, sur le terrain, les capacités conjointes de réponse rapide. Pour les forces armées et de sécurité congolaises, la continuité d’action est garantie : centres opérationnels de santé militaire, gendarmerie et protection civile demeurent interfacés avec leurs homologues tchadiens pour les exercices conjoints de contrôle aux frontières et de décontamination.
Enjeu industriel : cap sur 60 % de production locale
Au-delà de la coordination, l’ambition d’Africa CDC est d’accélérer la fabrication locale de produits médicaux afin d’atteindre 60 % de production africaine. Ce cap industriel résonne avec la stratégie de diversification économique impulsée par Brazzaville : développer une base productive nationale dans le secteur biomédical, c’est réduire la vulnérabilité aux ruptures d’approvisionnement et créer des synergies avec l’industrie de défense pour la maintenance, la logistique et la recherche. En promouvant la production locale, les États d’Afrique centrale posent les jalons d’une autonomie qui sert à la fois la santé publique, la sécurité intérieure et la posture stratégique régionale.
